Parce que l’on n’a jamais écrit.
Parce que l’on souhaiterait rencontrer d’autres écrivains, d’autres textes, d’autres lecteurs.
Parce que l’on peut vivre toute une existence en pensant à travers les mots, en pensant à ces instants où -bientôt- on prendra la plume, en pensant que l’on doit écrire, qu’il nous faut écrire, et que l’on n’écrit pas.
Parce qu’il ne faut pas rêver, mais pratiquer, l’écriture.
Parce que les feuillets s’accumulent et se dispersent sans prendre forme.
Parce que chez soi le temps et l’espace du silence ne parviennent pas à se déployer.
Parce que l’on aimerait que la solitude de l’écriture devienne partage, que le silence des mots, enfin, soit entendu.
Parce que la figure du poète inspiré n’est qu’un mythe et que l’écriture est avant un travail sur la langue.
Parce que l’on voudrait tant trouver les mots.
« Tout livre pousse sur d’autres livres, et peut-être que le génie n’est pas autre chose qu’un apport de bactéries particulières, une chimie individuelle délicate, au moyen de laquelle, un esprit neuf absorbe, transforme, et finalement restitue sous une forme inédite non pas le monde brut, mais plutôt l’énorme matière littéraire qui préexiste à lui ».
Julien Gracq, En lisant, en écrivant.