Le « creative writing » est une pratique ancienne aux Etats-Unis qui comptaient déjà plus de 40 cursus universitaires dans les années 1970, époque où commence véritablement l’histoire des ateliers d’écriture en France. On trouve aujourd’hui aux USA, dans tous les départements de littérature, des ateliers d’écriture animés par des écrivains renommés tels que Joyce Carol Oates ou Jonathan Safran Foer. Celui de l’université de l’Iowa en est l’un des plus prestigieux.
S’il faut attendre les années 1970 en France pour que se développe réellement la pratique des ateliers d’écriture, ne pensons pas pour autant qu’il s’agit d’une simple transposition des creative writing américains. On peut en effet remonter à des sources plus anciennes pour en retrouver l’origine, à commencer par la pédagogie active de Célestin Freinet qui incite à l’écriture de “textes libres” donnant lieu à une lecture à haute voix puis à un échange entre les écoles participant au mouvement. Pensons également aux expériences d’instituteurs dans les années 1950 qui, dans un contexte d’après guerre, ont cherché à solliciter la création des élèves afin de les aider à se reconstruire. Dans une autre registre, l’OuLiPo développe dans les années 60 un atelier de littérature expérimentale. Créés par Queneau, ces ateliers reposent sur des contraintes imposées qui aboutiront par exemple au célèbre roman de Perec, la Disparition (1969), structuré sur l’absence de la lettre e. Ainsi, les contraintes formelles étaient d’ores et déjà considérées comme un puissant stimulant pour l’imagination.
C’est à cette époque surtout qu’Élisabeth Bing commence à travailler dans un institut médico-pédagogique accueillant des enfants en difficulté dits “caractériels”. Confrontée à des problèmes inattendus et à des enfants résistants, c’est dans l’urgence et suivant ses propres intuitions qu’Élisabeth Bing invente, expérimente et parvient finalement à créer de véritables ateliers d’écriture grâce auxquels les enfants parviennent enfin à trouver leur propre langage. En 1973, La publication de Et je nageai jusqu’à la page, ouvrage dans lequel elle relate cette aventure singulière, va avoir un écho retentissant. En association avec l’université d’Aix-en-Provence, elle ouvre rapidement des ateliers de création littéraire pour adultes, précise peu à peu sa démarche et fonde Les ateliers d’écriture Elisabeth Bing en 1981.
Élisabeth Bing va dès lors former des animateurs qui créeront eux-mêmes d’autres structures ou qui renouvelleront l’expérience en travaillant par exemple au sein de prisons, de centres hospitaliers, de mairies, de lycées, de bibliothèques et, depuis peu, sur internet. Comme toutes les pratiques artistiques de groupe, l’atelier d’écriture peut en effet avoir différents objectifs en fonction du public concerné et des lieux dans lesquels il se développe : création, formation, initiation, lutte contre l’illettrisme, ou encore visée thérapeutique.